La notion de bases réciproques a été définie au cours du premier chapitre. Les espaces tensoriels ayant pour base des vecteurs, on va pouvoir généraliser la notion de bases réciproques aux espaces produits tensoriels pré-euclidiens. On va alors retrouver les mêmes propriétés de décomposition des tenseurs sur les bases réciproques que celles que l’on a mises en évidence pour les vecteurs.
Produits tensoriels de vecteurs réciproques - Choisissons une base ($\mathbf {e_{i}}$) de l’espace vectoriel $E_{n}$ dont la base réciproque est notée ($\mathbf {e^{j}}$). La décomposition des vecteurs $\mathbf {e_{i}}$ et $\mathbf {e^{j}}$ sur leur base réciproque est donnée par les relations (1.5.33) et (1.5.34), à savoir :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,\beq{e_{i}}=g_{ik}\,\beq{e^{k}}\,\,\,\,;\,\,\,\,(b)\,\,\,\,\beq{e^{k}}=g^{ik}\,\beq{e_{i}}
\tag{3.4.1}
\label{3.4.1}
\end{equation}
Si les vecteurs $\beqF {ij}=\beq {e_{i}}\otimes \beq {e_{j}}$ forment une base de $E_{n}^{(2)}$, il en est de même pour les vecteurs $\beqFu {ij}=\beq {e^{i}}\otimes \beq {e^{j}}$ puisque les
vecteurs $\mathbf {e^{k}}$ sont des vecteurs de base de $E_{n}$ et par suite de l’axiome PT3 du produit
tensoriel.
On va montrer que les systèmes de vecteurs $(\beq {e_{i}}\otimes \beq {e_{j}})$ et $(\beq {e^{i}}\otimes \beq {e^{j}})$ sont réciproques ; pour cela formons leur produit scalaire en utilisant l’expression (3.4.1)(b), il vient :
\begin{equation}
(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})\,\cdot\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{l}})=g^{km}\,g^{lp}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})\,\cdot\,(\beq{e_{m}}\otimes\beq{e_{p}})
\tag{3.4.2}
\label{3.4.2}
\end{equation}
Les relations (3.3.7) et (1.5.45) : $g^{km}\,g_{im}=\delta _{ki}$, nous donnent par substitution dans le produit scalaire précédent :
\begin{equation}
\beqF{ij}\,\cdot\,\beqFu{kl}=g^{km}\,g^{lp}\,g_{im}\,g_{jp}=(g^{km}\,g_{im})(g^{lp}\,g_{jp})=\delta_{ki}\,\delta_{lj}
\tag{3.4.3}
\label{3.4.3}
\end{equation}
On obtient la relation de définition (1.5.28) d’un système de vecteurs réciproques, la
notation indicielle devant naturellement être adaptée par rapport à la relation (1.5.28).
Tous les vecteurs $\beqF {ij}$ sont orthogonaux aux vecteurs $\beqFu {kl}$, sauf pour $i=k$, $l=j$.
Les relations entre les vecteurs réciproques sont donc identiques à celles obtenues au
chapitre Premier. On a par exemple, en substituant la relation (3.4.1)(a) dans l’expression
des vecteurs de base $\beq {e_{i}}\otimes \beq {e_{j}}$ :
\begin{equation}
\beqF{ij}=(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})=(g_{ik}\,\beq{e^{k}})\otimes(g_{jl}\,\beq{e^{l}})=g_{ik}\,g_{jl}\,\beqFu{kl}
\tag{3.4.4}
\label{3.4.4}
\end{equation}
Produits tensoriels mixtes - On peut former d’autres bases de l’espace $E_{n}^{(2)}$ en effectuant des combinaisons des bases réciproques ($\mathbf {e_{i}}$) et ($\mathbf {e^{j}}$) de $E_{n}$. On obtient ainsi deux autres types de vecteurs de base de $E_{n}^{(2)}$ de la forme :
\begin{equation}
%\,\,\,\,\textrm{\btFma{i}{j}}=\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}\,\,\,\,;\,\,\,\,\textrm{\btFmb{i}{j}}=\beq{e^{i}}\otimes\beq{e_{j}}
\,\,\,\,\beqFma{i}{j}=\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}\,\,\,\,;\,\,\,\,\beqFmb{i}{j}=\beq{e^{i}}\otimes\beq{e_{j}}
\tag{3.4.5}
\label{3.4.5}
\end{equation}
Ces deux bases sont différentes puisque le produit tensoriel n’est pas
commutatif. L’ordre des indices est donc important pour la notation puisqu’il
indique l’ordre dans lequel est effectué le produit tensoriel des vecteurs de base de
$E_{n}$.
Montrons que les systèmes de vecteurs donnés par la relation (3.4.5) sont réciproques.
Effectuons le produit scalaire des vecteurs $\beqFma {i}{j}$ et $\beqFmb {k}{l}$ en utilisant la relation (3.4.1)(b), il
vient :
\begin{equation}
(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}})\,\cdot\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e_{l}})=g^{jm}\,g^{kp}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{m}})\,\cdot\,(\beq{e_{p}}\otimes\beq{e_{l}})
\tag{3.4.6}
\label{3.4.6}
\end{equation}
Les relations (3.3.7) et (1.5.45) substituées dans (3.4.6), donnent :
\begin{equation}
\beqFma{i}{j}\,\cdot\,\beqFmb{k}{l}=g^{jm}\,g^{kp}\,g_{ip}\,g_{ml}=(g^{jm}\,g_{ml})\,(g^{kp}\,g_{ip})=\delta_{jl}\,\delta_{ki}
\tag{3.4.7}
\label{3.4.7}
\end{equation}
Les systèmes $\beqFma {i}{j}$ et $\beqFmb {k}{l}$ constituent deux bases réciproques de $E_{n}^{(2)}$.
Les vecteurs des différentes bases de $E_{n}^{(2)}$ peuvent s’exprimer en fonction les uns des autres. On a par exemple :
\begin{equation}
\beqFma{i}{j}=\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}=g_{ik}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{j}})=g_{ik}\,\beqFu{kj}
\tag{3.4.8}
\label{3.4.8}
\end{equation}
On remarque que le passage d’un type de vecteur à un autre s’effectue toujours par multiplication par des quantités $g_{ik}$ ou $g^{ik}$ et sommation. L’abaissement d’un seul indice (relation (3.4.8) par exemple) de la position supérieure contravariante à la position inférieure covariante, ne nécessite qu’une seule quantité $g_{ik}$. Par contre l’abaissement de deux indices (relation (3.4.4) par exemple), fait intervenir des produits de la forme $g_{ik}\,g_{jl}$.
Composantes contravariantes et covariantes - Comme pour les vecteurs, la
notion de contravariance et de covariance est relative au choix de la base que l’on
considère comme étant celle de référence. En particulier les composantes covariantes
relativement à une base deviennent contravariantes dans la base réciproque.
Considérons la base notée $\beqF {ij}=\beq {e_{i}}\otimes \beq {e_{j}}$ comme étant la base de référence de $E_{n}^{(2)}$. On note $\beqFu {ij}=\beq {e^{i}}\otimes \beq {e^{j}}$ sa base
réciproque.
La décomposition d’un tenseur $\mathbf {U}$ de $E_{n}^{(2)}$ s’écrit sur ces bases :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{ij}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})=u_{kl}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{l}})
\tag{3.4.9}
\label{3.4.9}
\end{equation}
avec $u_{kl}=\beq {U}\,\cdot \,(\beq {e^{k}}\otimes \beq {e^{l}})$. Les quantités $u^{ij}$ sont les composantes contravariantes de $\mathbf {U}$ par rapport à la base $\beqF {ij}$ ;
on peut également dire que ces composantes $u^{ij}$ sont deux fois contravariantes par rapport à
la base $\mathbf {e_{i}}$ de $E_{n}$.
Les quantités $u_{kl}$ sont les composantes covariantes de $\mathbf {U}$ par rapport à la base $\beqF {ij}$ ; on peut
dire également que ces composantes sont deux fois covariantes par rapport à la base $\mathbf {e_{i}}$ de $E_{n}$.
Dans la formule (3.4.9) les composantes $u_{kl}$ apparaissent également comme les composantes
contravariantes dans la base $\beqFu {ij}$ ; les quantités $u_{kl}$ sont également deux fois contravariantes par
rapport à la base $\mathbf {e^{i}}$.
On va retrouver la relation (3.3.19) entre les composantes contravariantes et covariantes. Substituons dans (3.4.9) l’expression (3.4.4), il vient :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{ij}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})=u^{ij}\,\big[g_{ik}\,g_{jl}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{l}})\big]=u_{kl}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{l}})
\tag{3.4.10}
\label{3.4.10}
\end{equation}
Identifiant les composantes relatives à un même vecteur de base, on obtient la relation (3.3.19) entre composantes contravariantes et covariantes :
\begin{equation}
u_{kl}=u^{ij}\,g_{ik}\,g_{jl}
\tag{3.4.11}
\label{3.4.11}
\end{equation}
ce qui permet le calcul des composantes covariantes connaissant les composantes
contravariantes.
Inversement, on peut obtenir l’expression des composantes contravariantes en fonction des covariantes en résolvant le système algébrique de $n^{2}$ équations (3.4.11). Plus simplement, l’utilisation de l’expression (3.4.1)(b) permet d’écrire la relation (3.4.9) sous la forme :
\begin{equation}
\beq{U}=u_{kl}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{l}})=u_{kl}\,(g^{ki}\,\beq{e_{i}}\otimes
g^{lj}\,\beq{e_{j}})=u_{kl}\,g^{ki}\,g^{lj}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})=u^{ij}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}})
\tag{3.4.12}
\label{3.4.12}
\end{equation}
L’identification des composantes du tenseur $\mathbf {U}$ nous donne :
\begin{equation}
u^{ij}=u_{kl}\,g^{ki}\,g^{lj}
\tag{3.4.13}
\label{3.4.13}
\end{equation}
Connaissant les composantes covariantes, on peut déduire de la relation (3.4.13) les composantes contravariantes de $\mathbf {U}$.
Composantes mixtes - Lorsqu’un tenseur $\mathbf {U}$ est décomposé sur une base mixte $\beqFma {i}{j}$ sous la forme :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{i}_{j}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}})
\tag{3.4.14}
\label{3.4.14}
\end{equation}
les composantes $u^{i}_{j}$ sont appelées composantes mixtes. On dit que $u^{i}_{j}$ est une composante
une fois contravariante et une fois covariante par rapport à la base $\mathbf {e_{i}}$, ce qui justifie le terme
de composante mixte.
Les composantes mixtes s’expriment en fonction des autres types de composantes. Pour obtenir ces diverses expressions, il suffit de transformer les vecteurs de base $\mathbf {e_{i}}$ ou $\mathbf {e^{i}}$ en utilisant les relations (3.4.1). On a par exemple :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{i}_{j}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}})=u^{i}_{j}\,(g_{ik}\,\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{j}})=u^{i}_{j}\,g_{ik}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{j}})=u_{kj}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{j}})
\tag{3.4.15}
\label{3.4.15}
\end{equation}
Par identification des composantes de l’expression précédente, il vient :
\begin{equation}
u_{kj}=u^{i}_{j}\,g_{ik}
\tag{3.4.16}
\label{3.4.16}
\end{equation}
Inversement on a, en utilisant (3.4.1)(b) :
\begin{equation}
u_{kj}\,(\beq{e^{k}}\otimes\beq{e^{j}})=u_{kj}\,(g^{ki}\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}})=u_{kj}\,g^{ki}(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}})=u^{i}_{j}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}})
\tag{3.4.17}
\label{3.4.17}
\end{equation}
soit en identifiant les composantes de l’expression précédente :
\begin{equation}
u^{i}_{j}=u_{kj}\,g^{ki}
\tag{3.4.18}
\label{3.4.18}
\end{equation}
Les formules précédentes, pour les bases et les composantes des tenseurs de $E_{n}^{(2)}$, se
généralisent pour des tenseurs d’ordre $p$ quelconque. Les bases d’un espace tensoriel $E_{n}^{(p)}$ seront
des combinaisons des vecteurs réciproques $\mathbf {e_{i}}$ et $\mathbf {e^{j}}$ de $E_{n}$.
La base suivante $(\beq {e_{i_{1}}}\otimes \beq {e_{i_{2}}}\otimes ...\otimes \beq {e_{i_{p}}})$, donne la décomposition d’un tenseur $\mathbf {U}$ de $E_{n}^{(p)}$ sous la forme :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{i_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}\,(\beq{e_{i_{1}}}\otimes\beq{e_{i_{2}}}\otimes...\otimes\beq{e_{i_{p}}})
\tag{3.4.19}
\label{3.4.19}
\end{equation}
Les quantités $u^{i_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}$ sont les composantes $p$ fois contravariantes par rapport à la base $\mathbf {e_{i}}$. On
dira plus simplement que ce sont les composantes contravariantes de $\mathbf {U}$ par rapport à la
base $(\beq {e_{i_{1}}}\otimes \beq {e_{i_{2}}}\otimes ...\otimes \beq {e_{i_{p}}})$.
La base réciproque de $(\beq {e_{i_{1}}}\otimes \beq {e_{i_{2}}}\otimes ...\otimes \beq {e_{i_{p}}})$ est notée $(\beq {e^{i_{1}}}\otimes \beq {e^{i_{2}}}\otimes ...\otimes \beq {e^{i_{p}}})$ et le tenseur $\mathbf {U}$ se décompose sur cette base sous la forme :
\begin{equation}
\beq{U}=u_{i_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}\,(\beq{e^{i_{1}}}\otimes\beq{e^{i_{2}}}\otimes...\otimes\beq{e^{i_{p}}})
\tag{3.4.20}
\label{3.4.20}
\end{equation}
Les quantités $u_{i_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}$ sont les composantes $p$ fois covariantes par rapport à la base $\mathbf {e_{i}}$. On
dira que ce sont les composantes covariantes du tenseur $\mathbf {U}$ par rapport à la base
$(\beq {e_{i_{1}}}\otimes \beq {e_{i_{2}}}\otimes ...\otimes \beq {e_{i_{p}}})$.
Les bases mixtes sont obtenues en combinant diversement des vecteurs $\mathbf {e_{i}}$ et $\mathbf {e^{j}}$. Par exemple, la base mixte $(\beq {e_{i_{1}}}\otimes \beq {e^{i_{2}}}\otimes \beq {e^{i_{3}}}\otimes ...\otimes \beq {e_{i_{p}}})$ donne la décomposition suivante d’un tenseur $\mathbf {U}$ :
\begin{equation}
%\beq{U}=u^{i_{1}}^{}_{i_{2}}^{i_{3}\,...\,i_{p}}\,(\beq{e_{i_{1}}}\otimes\beq{e^{i_{2}}}\otimes\beq{e_{i_{3}}}\otimes...\otimes\beq{e_{i_{p}}})
\beq{U}=u^{i_{1}\,\,\,\,i_{3}\,...\,i_{p}}_{\,\,\,\,i_{2}}\,(\beq{e_{i_{1}}}\otimes\beq{e^{i_{2}}}\otimes\beq{e_{i_{3}}}\otimes...\otimes\beq{e_{i_{p}}})
\tag{3.4.21}
\end{equation}
Les quantités $u^{i_{1}\,\,\,\,i_{3}\,...\,i_{p}}_{\,\,\,\,i_{2}}$ sont les composantes mixtes d’un tenseur $\mathbf {U}$. Ces composantes sont une
fois covariante et $(p-1)$ fois contravariantes par rapport à la base $\mathbf {e_{i}}$.
Les diverses relations entre les composantes de type différent se généralisent. On a par exemple, pour les composantes covariantes en fonction des composantes contravariantes :
\begin{equation}
u_{i_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}=g_{i_{1}\,k_{1}}\,g_{i_{2}\,k_{2}}\,...\,g_{i_{p}\,k_{p}}\,u^{k_{1}\,k_{2}\,...\,k_{p}}
\tag{3.4.22}
\label{3.4.22}
\end{equation}
Inversement, les composantes contravriantes s’expriment en fonction des composantes covariantes sous la forme :
\begin{equation}
u^{i_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}=g^{i_{1}\,k_{1}}\,g^{i_{2}\,k_{2}}\,...\,g^{i_{p}\,k_{p}}\,u_{k_{1}\,k_{2}\,...\,k_{p}}
\tag{3.4.23}
\label{3.4.23}
\end{equation}
La composante mixte $u_{i_{1}}^{i_{2}\,...\,i_{p}}$, une fois covariante et $(p-1)$ fois contravariantes, s’obtient à partir des composantes contravariantes par :
\begin{equation}
u_{i_{1}}^{i_{2}\,...\,i_{p}}=g_{i_{1}\,k_{1}}\,u^{k_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}
\tag{3.4.24}
\label{3.4.24}
\end{equation}
La composante mixte $u_{i_{1}\,i_{2}}^{i_{2}\,...\,i_{p}}$, deux fois covariantes et $(p-2)$ fois contravariantes, s’obtient à partir des composantes contravariantes par :
\begin{equation}
u_{i_{1}\,i_{2}}^{i_{3}\,...\,i_{p}}=g_{i_{1}\,k_{1}}\,g_{i_{2}\,k_{2}}\,u^{k_{1}\,k_{2}\,i_{3}\,...\,i_{p}}
\tag{3.4.25}
\label{3.4.25}
\end{equation}
La composante mixte $u^{i_{1}}_{i_{2}\,...\,i_{p}}$, une fois contravariante et $(p-1)$ fois covariantes, s’obtient à partir des composantes covariantes par :
\begin{equation}
u^{i_{1}}_{i_{2}\,...\,i_{p}}=g^{i_{1}\,k_{1}}\,u_{k_{1}\,i_{2}\,...\,i_{p}}
\tag{3.4.26}
\label{3.4.26}
\end{equation}
On voit que, par multiplication par une quantité $g^{ij}$ ou $g_{ij}$ et sommation, on peut placer chacun des indices d’un tenseur en position soit contravariante, soit covariante.
On a vu, au chapitre II, les propriétés de changement de base des composantes des
tenseurs d’ordre deux. Ces propriétés ont servi, au cours du cahpitre II, à définir les
composantes d’un tenseur d’ordre deux à partir de $n^{2}$ quantités données. On va retrouver
maintenant ces propriétés de changement de base comme conséquences de la définition
des espaces tensoriels donnée dans le présent chapitre.
Considérons un espace vectoriel $E_{n}$ rapporté aux bases $\mathbf {e_{i}}$ et $\mathbf {e_{j}}$ telles que :
\begin{equation}
(a)\,\,\, \beq{e_{i}}=A’^{k}_{i}\,\beq{e’_{k}} \,\,\,;\,\,\,(b)\,\,\, \beq{e’_{k}}=A^{i}_{k}\,\beq{e_{i}}
\tag{3.4.27}
\label{3.4.27}
\end{equation}
Choisissons, à titre d’exemple, le cas d’un espace tensoriel euclidien $E_{n}^{(3)}$ dont la base associée à $\mathbf {e_{i}}$ est constituée par les vecteurs $\beq {e_{i}}\otimes \beq {e_{j}}\otimes \beq {e_{k}}$ et celle associée à $\mathbf {e'_{j}}$ est $\beq {e'_{l}}\otimes \beq {e'_{m}}\otimes \beq {e'_{r}}$. Substituant les relations (3.4.27) dans chaque base associée et compte tenu des propriétés du produit tensoriel, on obtient :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}}\otimes\beq{e_{k}}=(A’^{l}_{i}\,A’^{m}_{j}\,A’^{r}_{k})\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’_{m}}\otimes\beq{e’_{r}}
\tag{3.4.28}
\label{3.4.28}
\end{equation}
\begin{equation}
(b)\,\,\,\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’_{m}}\otimes\beq{e’_{r}}=(A^{i}_{l}\,A^{j}_{m}\,A^{k}_{r})\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}}\otimes\beq{e_{k}}
\tag{3.4.29}
\label{3.4.29}
\end{equation}
Composantes contravariantes - Soit un tenseur $\mathbf {U}$ de l’espace tensoriel $E_{n}^{(3)}$ dont la décomposition rapportée à chacune des bases précécentes est :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{ijk}\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}}\otimes\beq{e_{k}})=u’^{lmr}\,(\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’_{m}}\otimes\beq{e’_{r}})
\tag{3.4.30}
\label{3.4.30}
\end{equation}
Substituons la relation (3.4.28) dans l’expression (3.4.30), il vient :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{ijk}\,(A’^{l}_{i}\,A’^{m}_{j}\,A’^{r}_{k})\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’_{m}}\otimes\beq{e’_{r}}
\tag{3.4.31}
\label{3.4.31}
\end{equation}
Comparant les composantes relatives aux mêmes vecteurs de base $\beq {e'_{l}}\otimes \beq {e'_{m}}\otimes \beq {e'_{r}}$ des relations précédentes, on obtient :
\begin{equation}
u’^{lmr}=(A’^{l}_{i}\,A’^{m}_{j}\,A’^{r}_{k})\,u^{ijk}
\tag{3.4.32}
\label{3.4.32}
\end{equation}
C’est l’expression reliant les composantes contravariantes d’un tenseur d’ordre trois d’une base dans une autre. Cette formule se généralise à un tenseur d’ordre quelconque. Inversement, on a :
\begin{equation}
u^{ijk}=(A^{i}_{l}\,A^{j}_{m}\,A^{k}_{r})\,u’^{lmr}
\tag{3.4.33}
\label{3.4.33}
\end{equation}
On vérifie que les composantes contravariantes $u^{ijk}$ se transforment selon des formules contraires de celles des vecteurs de base de $E_{n}^{(3)}$.
Composantes covariantes - Les composantes covariantes d’un tenseur euclidien $\mathbf {U}$ sont données, dans chaque base, par le produit scalaire :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,\beq{U}\,\cdot\,(\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}}\otimes\beq{e_{k}})=u_{ijk}
\,\,\,\,;\,\,\,\,(b)\,\,\,\,\beq{U}\,\cdot\,(\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’_{m}}\otimes\beq{e’_{r}})=u’_{lmr}
\tag{3.4.34}
\label{3.4.34}
\end{equation}
Substituons dans la relation (3.4.34)(a) la formule de changement de base (3.4.28), il vient :
\begin{equation}
u_{ijk}=\beq{U}\,\cdot\,\big[(A’^{l}_{i}\,A’^{m}_{j}\,A’^{r}_{k})\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’_{m}}\otimes\beq{e’_{r}}\big]=(A’^{l}_{i}\,A’^{m}_{j}\,A’^{r}_{k})\,u’_{lmr}
\tag{3.4.35}
\label{3.4.35}
\end{equation}
C’est l’expression reliant les composantes covariantes d’un tenseur d’ordre trois d’une base dans une autre et cette formule se généralise à des tenseurs d’ordre quelconque. Inversement, on a :
\begin{equation}
u’_{lmr}=(A^{i}_{l}\,A^{j}_{m}\,A^{k}_{r})\,u_{ijk}
\tag{3.4.36}
\label{3.4.36}
\end{equation}
Les composantes covariantes $u_{ijk}$ se transforment de la même manière que les vecteurs de
base de $E_{n}^{(3)}$.
Composantes mixtes - Considérons deux systèmes de vecteurs réciproques ; d’une part $\mathbf {e_{i}}$ et $\mathbf {e^{j}}$ et d’autre part $\mathbf {e'_{l}}$ et $\mathbf {e'^{m}}$. Ces bases sont liées entre elles par les relations (3.4.27) et les vecteurs réciproques sont tels que :
\begin{equation}
\beq{e^{j}}=A^{j}_{m}\,\beq{e’^{m}} \,\,\,;\,\,\,
\beq{e’^{m}}=A’^{m}_{j}\,\beq{e^{j}}
\tag{3.4.37}
\label{3.4.37}
\end{equation}
Soient deux bases associées de $E_{n}^{(3)}$ telles que $(\beq {e_{i}}\otimes \beq {e^{j}}\otimes \beq {e_{k}})$ et $(\beq {e'_{l}}\otimes \beq {e'^{m}}\otimes \beq {e'^{r}})$ ; on a les relations suivantes entre les bases :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}\otimes\beq{e_{k}}=(A’^{l}_{i}\,A^{j}_{m}\,A’^{r}_{k})\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’^{m}}\otimes\beq{e’_{r}}
\tag{3.4.38}
\label{3.4.38}
\end{equation}
\begin{equation}
(b)\,\,\,\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’^{m}}\otimes\beq{e’_{r}}=(A^{i}_{l}\,A’^{m}_{j}\,A^{k}_{r})\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}\otimes\beq{e_{k}}
\tag{3.4.39}
\label{3.4.39}
\end{equation}
Considérons un tenseur $\mathbf {U}$ de $E_{n}^{(3)}$ dont la décomposition sur ces bases nous donne :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{ik}_{j}\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}\otimes\beq{e_{k}}=u’^{lr}_{m}\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’^{m}}\otimes\beq{e’_{r}}
\tag{3.4.40}
\label{3.4.40}
\end{equation}
Substituons dans la relation précédente les expressions (3.4.38) et (3.4.39), il vient :
\begin{equation}
\beq{U}=u^{ik}_{j}\,(A’^{l}_{i}\,A^{j}_{m}\,A’^{r}_{k})\,\beq{e’_{l}}\otimes\beq{e’^{m}}\otimes\beq{e’_{r}}=u’^{lr}_{m}\,(A^{i}_{l}\,A’^{m}_{j}\,A^{k}_{r})\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e^{j}}\otimes\beq{e_{k}}
\tag{3.4.41}
\label{3.4.41}
\end{equation}
Comparant les composantes d’un même vecteur de base dans les relations (3.4.40), on obtient :
\begin{equation}
u^{ik}_{j}=u’^{lr}_{m}\,(A^{i}_{l}\,A’^{m}_{j}\,A^{k}_{r})\,\,\,\,;\,\,\,\,u’^{lr}_{m}=u^{ik}_{j}\,(A’^{l}_{i}\,A^{j}_{m}\,A’^{r}_{k})
\tag{3.4.42}
\label{3.4.42}
\end{equation}
Ce sont les relations liant les composantes mixtes d’un tenseur d’ordre trois d’une base dans une autre où l’on voit apparaître la règle de formation des formules de changement de base pour des tenseurs d’ordre quelconque.
Réciproquement, donnons-nous un système de $n^{3}$ quantités, par exemple $u^{ijk}$, et rattachons ces
quantités à une base $\beq {e_{i}}\otimes \beq {e_{j}}\otimes \beq {e_{k}}$. Si l’on effectue un changement de base tel que $\beq {e'_{l}}\otimes \beq {e'_{m}}\otimes \beq {e'_{r}}$ défini par les
relations (3.4.28) et (3.4.29), et si les quantités $u^{ijk}$ se transforment dans ce changement de
base selon les formules (3.4.35) et (3.4.36), alors on peut faire correspondre un tenseur $\mathbf {U}$ à
ces $n^{3}$ quantités $u^{ijk}$ qui constituent les composantes contravariantes de ce tenseur. Ces
composantes définissent le même tenseur $\mathbf {U}$ par rapport à n’importe quelle base puisqu’elles
vérifient les lois de transformation.
On peut faire les mêmes remarques en ce qui concerne les composantes covariantes et
les composantes mixtes. De plus, ces remarques sont valables pour des tenseurs d’ordre
quelconque.
On a donc le théorème suivant : Pour qu’une suite de $n^{3}$ quantités, rapportées à
une base d’un espace tensoriel $E_{n}^{(3)}$, puisse être considérée comme composantes
d’un tenseur, il faut et il suffit que ces quantités soient liées entre elles, dans
deux bases différentes de $E_{n}^{(3)}$, par les formules précédentes de transformation des
composantes.
Cette conclusion se généralise à $n^{p}$ quantités pouvant constituer les composantes d’un tenseur d’un espace tensoriel $E_{n}^{(p)}$. Ce théorème peut servir de définition des composantes d’un tenseur ainsi qu’on l’a fait au chapitre 2.