Considérons un champ de scalaire défini en chaque point d’un espace ponctuel $\varepsilon _{n}$ par une
fonction $F(y^{1},y^{2},...,y^{n})$ des coordonnées curvilignes $y^{i}$.
Dérivées partielles - On va montrer que les dérivées partielles $\partial _{k}\,F$ d’un champ de scalaires sont les composantes covariantes d’un vecteur. Pour cela, considérons un autre système de coordonnées curvilignes $(y'^{j})$ de $\varepsilon _{n}$ où ce même champ de scalaires s’écrit : $F(y^{1},y^{2},...,y^{n})=F'(y'^{1},y'^{2},...,y'^{n})$. La dérivation partielle d’une fonction composée nous donne :
\begin{equation}
\dfrac{\partial\,F}{\partial\,y^{j}}=\dfrac{\partial\,F’}{\partial\,y’^{i}}\,\dfrac{\partial\,y’^{i}}{\partial\,y^{j}}
\tag{5.4.1}
\label{5.4.1}
\end{equation}
Les relations (4.3.14) et (4.3.15) montrent que les quantités $\partial _{j}\,F$ se transforment
comme les vecteurs de base $(\beq {e_{i}})$ du repère naturel de $\varepsilon _{n}$. Les dérivées $\partial _{j}\,F$ sont donc des
quantités covariantes qui, pour $j=1,2,...,n$, constituent les composantes d’un tenseur d’ordre
un.
Définition du vecteur gradient - Ce tenseur d’ordre un est appelé le vecteur gradient de $F$. On note ce vecteur $\beq {grad}\,F$ et sa décomposition sur la base réciproque est donnée par :
\begin{equation}
\beq{grad}\,F=\partial_{k}\,F\,\beq{e^{k}}
\tag{5.4.2}
\label{5.4.2}
\end{equation}
Les composantes covariantes du vecteur gradient sont notées $grad_{k}\,F$, soit :
\begin{equation}
grad_{k}\,F=\partial_{k}\,F
\tag{5.4.3}
\label{5.4.3}
\end{equation}
Ses composantes contravariantes $grad^{i}\,F$ sur la base $(\beq {e_{i}})$ sont données par :
\begin{equation}
grad^{i}\,F=g^{ik}\,\partial_{k}\,F
\tag{5.4.4}
\label{5.4.4}
\end{equation}
Soit un champ de vecteurs $\mathbf {V}$ de composantes covariantes $v_{i}$. La dérivée covariante du vecteur $\mathbf {V}$a pour composantes covariantes les quantités données par la relation (5.2.12), à savoir :
\begin{equation}
\nabla_{j}\,v_{i}=\partial_{j}\,v_{i}-v_{k}\,\sgammaeq{j}{k}{i}
\tag{5.4.5}
\label{5.4.5}
\end{equation}
Échangeant les indices de cette dernière relation et remarquant que les symboles de Christoffel sont symétriques par rapport à leurs indices inférieurs, on obtient :
\begin{equation}
\nabla_{i}\,v_{j}=\partial_{i}\,v_{j}-v_{k}\,\sgammaeq{j}{k}{i}
\tag{5.4.6}
\label{5.4.6}
\end{equation}
Retranchons membre à membre les relations (5.4.5) et (5.4.6), il vient :
\begin{equation}
\nabla_{j}\,v_{i}-\nabla_{i}\,v_{j}=\partial_{j}\,v_{i}-\partial_{i}\,v_{j}
\tag{5.4.7}
\label{5.4.7}
\end{equation}
Les quantités figurant dans cette dernière relation représentent donc les composantes d’un nouveau tenseur appelé tenseur rotationnel du vecteur $\mathbf {V}$. C’est un tenseur antisymétrique que l’on note $\beq {rot}\,\beq {V}$ et l’on a :
\begin{equation}
\beq{rot}\,\beq{V}=(\nabla_{j}\,v_{i}-\nabla_{i}\,v_{j})\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}}=(\beq{rot}\,\beq{V})_{ij}\,\beq{e_{i}}\otimes\beq{e_{j}}
\tag{5.4.8}
\label{5.4.8}
\end{equation}
Vecteur rotationnel - On a vu, au chapitre III, que parmi les $n^{2}$ composantes d’un
tenseur antisymétrique d’ordre $n$, celui-ci possède $n(n-1)/2$ composantes strictes. Pour un espace à
trois dimensions, et seulement dans ce cas, le nombres de composantes strictes est égal à
la dimension de l’espace.
Dans le cas d’un espace euclidien $\varepsilon _{3}$ rapporté à un système de coordonnées orthonormées, le vecteur formé à partir des composantes strictes du tenseur $\beq {rot}\,\beq {V}$, et ayant pour composantes :
\begin{equation}
(\beq{rot}\,\beq{V})_{1}=\partial_{2}\,v_{3}-\partial_{3}\,v_{2}\,\,\,;\,\,\,(\beq{rot}\,\beq{V})_{2}=\partial_{3}\,v_{1}-\partial_{1}\,v_{3}\,\,\,;\,\,\,(\beq{rot}\,\beq{V})_{3}=\partial_{1}\,v_{2}-\partial_{2}\,v_{1}
\tag{5.4.9}
\label{5.4.9}
\end{equation}
constitue le vecteur rotationnel classique. C’est un exemple de vecteur adjoint d’un tenseur.
Soit un champ de vecteur $\mathbf {V}$ dont la dérivée covariante est $\nabla _{k}\,v^{i}$. Par contraction du tenseur $\nabla _{k}\,v^{i}$, on obtient un scalaire $\nabla _{i}\,v^{i}$ appelé divergence du vecteur $\mathbf {V}$. On note la divergence :
\begin{equation}
\beq{div}\,\beq{V}=\nabla_{i}\,v^{i}
\tag{5.4.10}
\label{5.4.10}
\end{equation}
L’expression développée de la dérivée covariante :
\begin{equation}
\nabla_{k}\,v^{i}=\partial_{k}\,v^{i}+v^{j}\,\sgammaeq{k}{i}{j}
\tag{5.4.11}
\label{5.4.11}
\end{equation}
donne pour expression de la divergence :
\begin{equation}
\beq{div}\,\beq{V}=\partial_{i}\,v^{i}+v^{j}\,\sgammaeq{i}{i}{j}
\tag{5.4.12}
\label{5.4.12}
\end{equation}
L’expression du symbole de Christoffel contracté $\sgammaeq {i}{i}{j}$, donnée par la relation (5.3.40), permet d’écrire la divergence sous la forme :
\begin{equation}
\beq{div}\,\beq{V}=\partial_{i}\,v^{i}+\dfrac{v^{i}}{\sqrt{|g|}}\,\partial_{i}\,\sqrt{|g|}
\tag{5.4.13}
\label{5.4.13}
\end{equation}
Cette dernière expression peut être transformée en utilisant la relation suivante entre deux quantités différentiables $a$ et $b$ :
\begin{equation}
\dfrac{1}{a}\,\text{d}(b\,a)=\text{d}b+\dfrac{b}{a}\,\text{d}a
\tag{5.4.14}
\label{5.4.14}
\end{equation}
et en posant : $a=\sqrt {|g|}$, $b=v^{i}$ ; on obtient :
\begin{equation}
\beq{div}\,\beq{V}=\dfrac{1}{\sqrt{|g|}}\,\partial_{i}\,(v^{i}\,\sqrt{|g|})
\tag{5.4.15}
\label{5.4.15}
\end{equation}
Pour un système de coordonnées orthonormées, $g=1$, on retrouve l’expression classique de la divergence : $\beq {div}\,\beq {V}=\partial _{i}\,v^{i}$.
On appelle laplacien d’un champ de scalaire défini par une fonction $F(y^{1},y^{2},...,y^{n})$ à valeurs scalaires, l’expression :
\begin{equation}
\Delta\,F=\beq{div}\,\beq{grad}\,F
\tag{5.4.16}
\label{5.4.16}
\end{equation}
L’expression du laplacien s’obtient à partir de la définition (5.4.10) de la divergence et des composantes contravariantes du gradient $g^{ik}\,\partial _{k}\,F$, on a :
\begin{equation}
\Delta\,F=\nabla_{i}\,(g^{ik}\,\partial_{k}\,F)
\tag{5.4.17}
\label{5.4.17}
\end{equation}
La propriété de permutation de la dérivée covariante avec le changement de variance par multiplication par $g^{ij}$ et sommation, nous donne :
\begin{equation}
\Delta\,F=g^{ik}\,\nabla_{i}\,(\partial_{k}\,F)
\tag{5.4.18}
\label{5.4.18}
\end{equation}
Les quantités $\nabla _{i}\,(\partial _{k}\,F)$ sont les composantes covariantes de la dérivée covariante du vecteur $\beq {grad}\,F$ ; elles sont données par la relation (5.2.12), soit :
\begin{equation}
\nabla_{i}\,(\partial_{k}\,F)=\partial_{ik}\,F-\sgammaeq{i}{l}{k}\,\partial_{l}\,F
\tag{5.4.19}
\label{5.4.19}
\end{equation}
d’où l’expression du laplacien :
\begin{equation}
\Delta\,F=g^{ik}\,(\partial_{ik}\,F-\sgammaeq{i}{l}{k}\,\partial_{l}\,F)
\tag{5.4.20}
\label{5.4.20}
\end{equation}
On obtient également une expression du laplacien en reportant les composantes contravariantes de $\beq {grad}\,F$ dans la relation (5.4.15), soit :
\begin{equation}
\Delta\,F=\dfrac{1}{\sqrt{|g|}}\,\partial_{i}\,(\sqrt{|g|}\,g^{ik}\,\partial_{k}\,F)
\tag{5.4.21}
\label{5.4.21}
\end{equation}
Pour un système de coordonnées orthonormées, $g^{ik}=\delta ^{ik}$, on retrouve l’expression classique du laplacien : $\Delta \,F=\partial _{kk}\,F$.