Repère cartésien - Tout espace vectoriel pré-euclidien $E_{n}$ possédant une base
orthonormée $\mathbf {e^{0}_{i}}$, considérons en un point origine $O$ un repère $(O,\beq {e^{0}_{i}})$ de l’espace ponctuel $\varepsilon _{n}$. On dira
que ce repère est un repère cartésien. On pourra, en particulier, attacher à chaque
point $M$ de $\varepsilon _{n}$ un repère cartésien $(M,\beq {e^{0}_{i}})$ dont les vecteurs seront identiques en chaque
point.
On note $x^{i}$ les coordonnées des vecteurs $\mathbf {OM}$ dans un repère cartésien.
Base naturelle - On a vu que les dérivées et les différentielles d’un vecteur $\mathbf {OM}$ de $\varepsilon _{n}$ sont indépendants du point $O$ d’un repère donné. Si $\varepsilon _{n}$ est rapporté à un système de coordonnées curvilignes $u^{k}$, on peut donc écrire, en appelant $\mathbf {e_{k}}$ les vecteurs suivants :
\begin{equation}
\beq{e_{k}}=\dfrac{\partial\,\beq{OM}}{\partial\,u^{k}}=\partial_{k}\,\beq{M}
\tag{4.3.1}
\label{4.3.1}
\end{equation}
Soient $u^{1},u^{2},...,u^{n}$ les coordonnées curvilignes du point $M$ par rapport à un repère cartésien $(O,\beq {e^{0}_{i}})$. Dans ce repère, on a : $\beq {OM}=x^{i}\,\beq {e^{0}_{i}}$, où les coordonnées cartésiennes sont des fonctions $x^{i}=x^{i}(u^{1},u^{2},...,u^{n})$. Le vecteur $\mathbf {e_{k}}$ défini par (4.3.1) a pour expression :
\begin{equation}
\beq{e_{k}}=\partial_{k}\,(x^{i}\,\beq{e^{0}_{i}})=(\partial_{k}\,x^{i})\,\beq{e^{0}_{i}}
\tag{4.3.2}
\label{4.3.2}
\end{equation}
À partir des composantes $\partial _{k}\,x^{i}$ du vecteur $\mathbf {e_{k}}$, on peut former un déterminant $D(\partial _{k}\,x^{i})$ qui est
précisément le jacobien (4.2.6) des fonctions $x^{i}$. Puisque ce déterminant est différent de
zéro, il en résulte que les $n$ vecteurs $\mathbf {e_{k}}$ sont linéairement indépendants.
Ces $n$ vecteurs, définis par la relation (4.3.1) sont appelés la base naturelle au point $M$
de l’espace vectoriel associé $E_{n}$. Ils sont colinéaires aux tangentes des $n$ lignes coordonnées
qui se coupent en point $M$ où ils sont définis.
Repère naturel - Associons au point $M$ de $\varepsilon _{n}$ un repère formé par le point $M$ et par les
vecteurs de la base naturelle. Ce repère est appelé le repère naturel en $M$ du système de
coordonnées $u^{k}$ ; il sera noté $(M,\beq {e_{k}})$ ou $(M,\partial _{k}\,\beq {M})$.
La différentielle du vecteur $\mathbf {OM}$ s’exprime sous la forme :
\begin{equation}
\text{d}\beq{M}=\partial_{k}\,\beq{M}\,\text{d}u^{k}=\beq{e_{k}}\,\text{d}u^{k}
\tag{4.3.3}
\label{4.3.3}
\end{equation}
Les quantités $\text {d}u^{k}$ constituent donc les composantes contravariantes du vecteur d$\mathbf {M}$ dans le repère naturel $(M,\beq {e_{k}})$ du système de coordonnées $u^{k}$.
Déterminons la base naturelle de l’espace vectoriel $E_{3}$ associé à l’espace ponctuel $\varepsilon _{3}$ de la géométrie ordinaire, en coordonnées sphériques. Écrivons l’expression des vecteurs $\mathbf {OM}$ dans un repère fixe cartésien $(O,\beq {e^{0}_{i}})$ :
\begin{equation}
\beq{OM}=x^{i}\,\beq{e^{0}_{i}}=r\,\text{sin}\,\theta\,\text{cos}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{1}}+r\,\text{sin}\,\theta\,\text{sin}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{2}}+r\,\text{cos}\,\theta\,\beq{e^{0}_{3}}
\tag{4.3.4}
\label{4.3.4}
\end{equation}
Les vecteurs $\mathbf {e^{0}_{i}}$ étant fixes, le vecteur $\mathbf {e_{1}}$ de la base naturelle s’écrit :
\begin{equation}
\beq{e_{1}}=\partial_{1}\,\beq{M}=\text{sin}\,\theta\,\text{cos}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{1}}+\text{sin}\,\theta\,\text{sin}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{2}}+\text{cos}\,\theta\,\beq{e^{0}_{3}}
\tag{4.3.5}
\label{4.3.5}
\end{equation}
Le vecteur $\mathbf {e_{1}}$ est porté par la droite $(OM)$ et dirigé dans le sens des $r$ croissants. La dérivée de $\mathbf {OM}$ par rapport à $\theta $ donne le vecteur $\mathbf {e_{2}}$ :
\begin{equation}
\beq{e_{2}}=\partial_{2}\,\beq{M}=r\,\text{cos}\,\theta\,\text{cos}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{1}}+r\,\text{cos}\,\theta\,\text{sin}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{2}}-r\,\text{sin}\,\theta\,\beq{e^{0}_{3}}
\tag{4.3.6}
\label{4.3.6}
\end{equation}
C’est un vecteur tangent à un grand cercle centré sur l’origine $O$ et dirigé dans le sens croissant de la coordonnée $\theta $. La dérivée par rapport à $\varphi $ donne le vecteur $\mathbf {e_{3}}$ :
\begin{equation}
\beq{e_{3}}=\partial_{3}\,\beq{M}=-r\,\text{sin}\,\theta\,\text{sin}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{1}}+r\,\text{sin}\,\theta\,\text{cos}\,\varphi\,\beq{e^{0}_{2}}
\tag{4.3.7}
\label{4.3.7}
\end{equation}
C’est un vecteur tangent à un cercle parallèle au plan $x^{1}Ox^{2}$, centré sur l’axe $Ox^{3}$, et dirigé dans le
sens des valeurs croissantes de $\varphi $.
Ces trois vecteurs sont orthogonaux entre eux ainsi qu’on le vérifie aisément en
effectuant les produits scalaires $\beq {e_{i}}\,\cdot \,\beq {e_{j}}$. Lorsqu’il en est ainsi, on dit que les coordonnées sont
des coordonnées curvilignes orthogonales.
Ces vecteurs ne sont pas tous normés, puisque l’on a :
\begin{equation}
g_{11}=\beq{e_{1}}\,\cdot\,\beq{e_{1}}=1;\,\,\,g_{22}=\beq{e_{2}}\,\cdot\,\beq{e_{2}}=r^{2};\,\,\,g_{33}=\beq{e_{3}}\,\cdot\,\beq{e_{3}}=r^{2}\,\text{sin}^{2}\,\theta
\tag{4.3.8}
\label{4.3.8}
\end{equation}
Le repère naturel, en coordonnées sphériques, est donc formé par des vecteurs variables en direction et en module en chaque point $M$. Les quantités $g_{ij}$ constituent un exemple de tenseur attaché à chacun des points $M$ de l’espace $\varepsilon _{3}$.
Considérons deux systèmes quelconques de coordonnées curvilignes $u^{i}$ et $u'^{k}$, liées entre elles par les relations :
\begin{equation}
u^{i}=u^{i}\,(u’^{1},u’^{2},...,u’^{n})\,\,\,\,;\,\,\,\,u’^{k}=u’^{k}\,(u^{1},u^{2},...,u^{n})
\tag{4.3.9}
\label{4.3.9}
\end{equation}
où les fonctions $u^{i}\,(u'^{1},u'^{2},...,u'^{n})$ sont supposées être plusieurs fois continuement dérivables par
rapport aux $u'^{k}$ et de même pour les fonctions $u'^{k}\,(u^{1},u^{2},...,u^{n})$ par rapport aux coordonnées $u^{i}$. Lorsqu’on
passe d’un système de coordonnées à un autre, on dit que l’on effectue un changement de
coordonnées curvilignes.
Les coordonnées $x^{j}$ par rapport à un repère fixe, sont liées également à chaque système de coordonnées curvilignes et l’on suppose que les jacobiens $D(\partial \,x^{j}/\partial \,u^{i})$ et $D(\partial \,x^{j}/\partial \,u'^{k})$ sont différents de zéro. Dans ce cas, le jacobien $D(\partial \,u^{i}/\partial \,u'^{k})$ est également non nul puisqu’on a la relation classique :
\begin{equation}
D\bigg(\dfrac{\partial\,x^{j}}{\partial\,u^{i}}\bigg)\,D\bigg(\dfrac{\partial\,u^{i}}{\partial\,u’^{k}}\bigg)=D\bigg(\dfrac{\partial\,x^{j}}{\partial\,u’^{k}}\bigg)
\tag{4.3.10}
\label{4.3.10}
\end{equation}
Changement de base naturelle - À chaque système de coordonnées curvilignes $u^{i}$ et $u'^{k}$ données par (4.3.9) est associé respectivement une base naturelle telle que :
\begin{equation}
\beq{e_{k}}=\dfrac{\partial\,\beq{M}}{\partial\,u^{i}}\,\,\,;\,\,\,\beq{e’_{k}}=\dfrac{\partial\,\beq{M}}{\partial\,u’^{k}}
\tag{4.3.11}
\label{4.3.11}
\end{equation}
Le calcul des relations entre les vecteurs de ces deux bases s’effectue en utilisant la formule de dérivation des fonctions composées, soit :
\begin{equation}
\beq{e’_{k}}=\dfrac{\partial\,\beq{M}}{\partial\,u’^{k}}=\dfrac{\partial\,\beq{M}}{\partial\,u^{i}}\,\dfrac{\partial\,u^{i}}{\partial\,u’^{k}}=\beq{e_{i}}\,\dfrac{\partial\,u^{i}}{\partial\,u’^{k}}
\tag{4.3.12}
\label{4.3.12}
\end{equation}
Inversement, le développement de la dérivée $\dfrac {\partial \,\beq {M}}{\partial \,u^{i}}$ conduit à la relation :
\begin{equation}
\beq{e_{i}}=\dfrac{\partial\,u’^{k}}{\partial\,u^{i}}\,\beq{e’_{k}}
\tag{4.3.13}
\label{4.3.13}
\end{equation}
Lorsqu’on passe d’un système de coordonnées curvilignes à un autre, on substitue à la base $(\beq {e_{i}})$ de l’espace vectoriel $E_{n}$, une autre base $(\beq {e'_{k}})$ de ce même espace vectoriel. Les relations de changement de base d’un espace vectoriel ont été utilisées précédemment en Algèbre et écrites sous la forme des relations (1.3.12) et (1.3.13), à savoir :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,\beq{e_{i}}=A’^{k}_{i}\,\beq{e’_{k}}\,\,\,\,;\,\,\,\,(b)\,\,\,\,\beq{e’_{k}}=A^{i}_{k}\,\beq{e_{i}}
\tag{4.3.14}
\label{4.3.14}
\end{equation}
Comparant les expressions (4.3.12) et (4.3.13) à la relation (4.3.14) et identifiant les coefficients des mêmes vecteurs de base, il vient :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,A’^{k}_{i}=\dfrac{\partial\,u’^{k}}{\partial\,u^{i}}\,\,\,\,;\,\,\,\,(b)\,\,\,\,A^{i}_{k}=\dfrac{\partial\,u^{i}}{\partial\,u’^{k}}
\tag{4.3.15}
\label{4.3.15}
\end{equation}
En conclusion, à tout système de coordonnées curvilignes $u^{i}$ et $u'^{k}$ sont associés
respectivement, en un même point $M$ de $\varepsilon _{n}$, des repères naturels $(M,\beq {e_{i}})$ et $(M,\beq {e'_{k}})$ dont les
bases naturelles sont liées par les relations (4.3.12) et (4.3.13). À tout
changement de coordonnées curvilignes correspond un changement de base
donné par les formules (4.3.14) et (4.3.15).
Notation - La notation abrégée (4.1.21) des dérivées partielles permet d’écrire les formules de changement de base sous la forme :
\begin{equation}
(a)\,\,\,\,A’^{k}_{i}=\partial_{i}\,u’^{k}\,\,\,\,;\,\,\,\,(b)\,\,\,\,A^{i}_{k}=\partial_{k}\,u^{i}
\tag{4.3.16}
\label{4.3.16}
\end{equation}
On a vu que le carré de la distance $\text {d}s^{2}$ entre deux points $M$ et $M'$ infiniment proches est donnée par la relation (4.1.10), à savoir :
\begin{equation}
\text{d}s^{2}=g_{ij}\,\text{d}x^{i}\,\text{d}x^{j}
\tag{4.3.17}
\label{4.3.17}
\end{equation}
où les $dx^{i}$ sont les composantes du vecteur $\text {d}\beq {M}=\beq {MM'}$, rapportées à un repère fixe d’un espace
ponctuel $\varepsilon _{n}$. Lorsque cet espace est rapporté à un système de coordonnées curvilignes $u^{i}$, la
relation (4.3.3) montre que le vecteur $\text {d}\beq {M}$ a pour composantes contravariantes les quantités $\text {d}u^{i}$
par rapport au repère naturel $(M,\beq {e_{i}})$.
Le carré de la distance $\text {d}s^{2}$ s’écrit alors dans le repère naturel :
\begin{equation}
\text{d}s^{2}=g_{ij}\,\text{d}u^{i}\,\text{d}u^{j}
\tag{4.3.18}
\label{4.3.18}
\end{equation}
où les quantités $g_{ij}=\beq {e_{i}}\,\cdot \,\beq {e_{j}}$ sont les composantes du tenseur fondamental ou tenseur métrique
définies à l’aide d’une base naturelle. L’expression (4.3.18) s’appelle l’élément linéaire
de l’espace ponctuel $\varepsilon _{n}$ ou encore la métrique de cet espace.
Les vecteurs $\mathbf {e_{i}}$ du repère naturel varient en général d’un point à un autre. C’est le cas, par exemple, des coordonnées sphériques dont les quantités $g_{ij}$ sont données par la relation (4.3.8). La métrique de l’espace $\varepsilon _{3}$, en coordonnées sphériques, est donnée par :
\begin{equation}
\text{d}s^{2}=\text{d}r^{2}+r^{2}\,\text{d}\theta^{2}+r^{2}\,\text{sin}^{2}\theta\,\text{d}\varphi^{2}
\tag{4.3.19}
\label{4.3.19}
\end{equation}
Une courbe $\Gamma $ de $\varepsilon _{n}$ peut être définie par la donnée des coordonnées curvilignes $u^{i}(\alpha )$ du lieu des points $M(\alpha )$ en fonction du paramètre $\alpha $. La distance élémentaire $ds$ sur cette courbe $\Gamma $ s’écrit alors :
\begin{equation}
\text{d}s=\bigg[g_{ij}\,\dfrac{\partial\,u^{i}}{\partial\,\alpha}\,\dfrac{\partial\,u^{j}}{\partial\,\alpha}\bigg]^{1/2}\,d\alpha
\tag{4.3.20}
\label{4.3.20}
\end{equation}
Lorsque $\alpha $ varie dans un intervalle $[\alpha _{1},\alpha _{2}]$ le point $M$ parcourt un arc de courbe, allant d’un point $M_{1}$ à un point $M_{2}$. La longueur de l’arc $M_{1}M_{2}$ est donnée par l’intégrale :
\begin{equation}
\textrm{arc}\,M_{1}M_{2}=\mathlarger{\int}_{\alpha_{1}}^{\alpha_{2}}\,\bigg[g_{ij}\,\dfrac{\partial\,u^{i}}{\partial\,\alpha}\,\dfrac{\partial\,u^{j}}{\partial\,\alpha}\bigg]^{1/2}\,d\alpha
\tag{4.3.21}
\label{4.3.21}
\end{equation}